Zone
A
Lors des premiers aménagements, le site était au départ très ouvert et presque dépourvu de végétation. Des mares peu profondes et reliées à la nappe phréatique furent creusées
mécaniquement dans la partie Nord du site afin de favoriser la reproduction du crapaud calamite. Une grande pièce d’eau centrale, également reliée à la nappe, fut aussi aménagée. Elle se révéla très attractive pour les oiseaux aquatiques en migration comme les limicoles, canards, laridés,... Le Vanneau huppé (Vanellus vanellus) et le Petit Gravelot (Charadrius dubius) s’y sont rapidement installés comme nicheurs.
En quelques années, la zone fut rapidement colonisée par une mégaphorbiaie de type roselière en son centre et de plus en plus « envahie » par les saules en périphérie. Cette nouvelle conformation du milieu attira des espèces nicheuses peu communes en Basse-Meuse comme la Gorgebleue (Luscinia svecica), la Rousserolle effarvatte (Acrocephalus scirpaceus), le Bruant des roseaux (Emberiza schoeniclus), le Tarier pâtre (Saxicola rubicola) et d’autres plus communes comme la Foulque macroule (Fulica atra) et le Grèbe castagneux (Tachybaptus fuficollis). L’hivernage ou le passage de la Rémiz penduline a tendance à devenir plus régulier.
Zone
B
Etirée toute en longueur au bas du merlon attenant à la plateforme du Trilogiport, cette zone fut aussi très ouverte et peu colonisée par la végétation lors des premiers aménagements.
Plusieurs mares artificielles y ont été creusées pour favoriser l’installation du crapaud calamite (mares avec bâches et mares creusées à la machine).
Le girobroyage régulier par une société privée continue à maintenir un milieu ouvert dans la partie centrale alors que la périphérie est recolonisée par une végétation variée (aulnes, saules, ronciers, églantiers, aubépines et autres arbustes indigènes…) attractive pour des passereaux comme la Rousserolle verderolle, la Fauvette des jardins, la Fauvette grisette, le Tarier pâtre, l’Hypolais ictérine, la Linotte et bien d’autres…
L’étang visible sur le schéma est entouré d’une végétation rivulaire (avec notamment de grands saules).
Le Trilogiport est une plate-forme multimodale appartenant au port autonome de Liège et destinée à accueillir des activités logistiques liées au transport de conteneurs. Elle se situe le long du canal Albert dans la commune d’Hermalle-sous-Argenteau. Il s’agit donc concrètement d’une grande zone à vocation industrielle de plus de 100 hectares, située en plaine alluviale, et encore en plein développement à l’heure où j’écris ces lignes.
Avant le début des travaux d’aménagement du terminal, le site se présentait comme une grande friche industrielle en voie de recolonisation forestière, interrompue par de larges dépôts de terre. Au fil du temps, la faune et la flore y trouvèrent un espace préservé pour s’y développer avec des espèces telles que le Vanneau huppé, le Bruant des roseaux, le Rossignol philomèle, le Tarier pâtre, et surtout une remarquable population de Crapauds calamite (Bufo calamita).
Lorsque les travaux commencèrent, 39 hectares de terres furent consacrés en tant que zone d’intégration environnementale. On y créa des étangs de pêche, plantations de haies, prairies de fauche, jardins communautaires, mais aussi une zone spécifiquement dédiée à la préservation et à la restauration de la population de Crapauds calamites (Bufo calamita) qui fut assez bien impactée par les travaux de la plateforme portuaire. Une série de mares a donc été creusée au sein d’une zone de compensation de plusieurs hectares ponctuée d’abris divers et d’un crapauduc pour permettre le passage des animaux en toute sécurité entre les friches (zone A et B). Cette grande zone de protection peu végétalisée convient parfaitement au crapaud calamite, espèce pionnière et héliophile.
Plan du site à l’heure actuelle :
Et le rôle de notre ASBL dans tout ça ?
Nous nous sommes rapidement aperçus que si le site voulait garder son attractivité pour la biodiversité, la gestion devait être en partie repensée. Laisser « faire la nature » dans le cas de ce site industriel très artificialisé, reviendrait à moyen terme, à perdre une bonne part de la biodiversité acquise au fils des années.
Nous avons donc pris contact avec la DNF (responsable de la gestion du site mais disposant de peu de temps) afin d’exposer notre vision des choses et de proposer notre aide pour la gestion qui fut la bienvenue.
- A moyen terme, la poussée des saules sur l’ensemble des deux zones risquerait de fermer totalement le milieu et de menacer la reproduction du Crapaud calamite (Bufo calamita) mais aussi des espèces liées aux milieux ouverts comme le Vanneau huppé et le Petit Gravelot (nicheur rare en Basse-Meuse). La grande phragmitaie de la zone A pourrait aussi subir le même phénomène.
Afin d’endiguer la poussée rapide des saules, la gestion consisterait donc à enlever une partie de ces arbres dans les zones que nous souhaitons garder ouverte. Mais vu la taille du site, il ne nous est pas vraiment possible de tout faire à la débroussailleuse. Des gestionnaires velus, les vaches Highland, seront placées dans le périmètre de la Zone A afin (nous l’espérons) de détruire une partie des jeunes pousses de saules. C’est le premier essai de gestion de ce type pour le Trilogiport.
- La plupart des mares creusées pour le Crapaud calamite (Bufo calamita) sont en voie d’assèchement et de recolonisation végétative (Zone A et Zone B). Les précédents épisodes caniculaires ayant renforcé cet effet. La solution consisterait donc en un recreusement plus en profondeur des mares (niveau de la nappe) afin de bénéficier de l’eau le plus longtemps possible pour permettre aux crapauds d’accomplir leur cycle. Le nettoyage des mares serait aussi favorable à cette espèce pionnière qui aime les zones peu végétalisées. Des mares seraient aussi laissées en place telle quelle pour la Grenouille verte et les tritons (si toujours présents ?).
Premiers travaux de gestion
Travaux
du 31 octobre 2020
Après avoir eu l’aval et la confiance de la DNF, les premiers travaux ont commencé ce 31 octobre dans la Zone A (voir plan en bas de page).
Sous une météo clémente, l’équipe de Luscinia Nature fut à pied d’œuvre pour aménager le site. Nous avons consacré cette première journée de gestion à l’abattage des saules commençant à envahir la zone de reproduction des crapauds calamites. La zone fut bien nettoyée et nous a permis de découvrir et de comptabiliser toutes les mares et surtout de voir leur état de conservation.
Nous avons également dégagé une partie de la phragmitaie envahie par les jeunes pousses de saules et attenante à la zone ouverte où se reproduisent les Petits Gravelots et le Vanneau huppé.
Les restes de branchages furent évacués manuellement puis rassemblés en fagots afin d’être récupérés par un tracteur et placés en périphérie de la zone. Ils serviront de refuge à la faune. Rien ne se perd !
Travaux
du 14 novembre 2020
Ce samedi 14 novembre, nous entamions notre deuxième journée de gestion dans la zone A (voir plan en bas de page) du Trilogiport.
Objectif de la journée : recreuser les mares favorables au crapaud calamite et terminer l’arrachage des saules envahissant la phragmitaie à proximité des mares. Travail demandant plus d’outil technique que la dernière gestion.
Nous avons donc utilisé une pelleteuse pour recreuser les mares en profondeur et atteindre (si possible) le niveau de la nappe phréatique afin de bénéficier d’un apport d’eau le plus longtemps possible au cours du printemps et de l’été.
Le Crapaud calamite (Bufo calamita) est une espèce qui fréquente plutôt les pièces d’eau peu profondes se réchauffant vite. Nous avons donc été vigilants à recréer des mares adaptées, pas trop profondes (+- 60 cm max) avec une longue pente douce permettant aux crapauds d’y accéder facilement et de déposer leurs cordons d’œufs en petite profondeur. Durant les travaux, elles furent aussi en partie dévégétalisées.
Le Crapaud calamite (Bufo calamita) est facilement identifiable à sa ligne vertébrale jaune parcourant son dos. Son aspect plus « tacheté de clair » et les glandes parotoides parallèles entre elles sont aussi des bons indices d’identification pour le différencier de son cousin le crapaud commun. Le chant reste toutefois le critère le plus évident en période de reproduction.
Extraits de Nos Travaux
du 12 mai 2020
Une des mares AVANT aménagement : assèchement et recolonisation par la végétation.
La même mare APRES aménagement : recreusement au niveau de la nappe (plus de profondeur), création de berges douces et arrachage d’une partie de la végétation.
La prochaine étape sera l’arrivée de nos belles gestionnaires : des vaches Highland gentiment mise à notre disposition par un agriculteur local !
Nous espérons que l’essai se révèlera fructueux pour les gestions à venir.
Nous ne manquerons pas de vous tenir informé !